Lenno

surnommé Len

La trace du solitaire m'avait fait quitter déjà depuis un moment le territoire de ma meute. Cet inconnu avait prit pour habitude de venir chasser dans notre bois, et j'avais dû insister auprès de Makanto pour qu'il m'autorise à suivre sa trace même s'il venait de partir sur d'autres terres. J'étais en traque, et je n'avais pas besoin de renifler le sol. Ses traces de pattes étaient nettes dans la poudreuse blanche, et encore toutes fraiches. Il n'était pas loin. Ce loup avait besoin d'une bonne leçon. Ou du moins, que je mette les choses au clair avec lui. Peut être ne savait il pas qu'il volait le gibier d'une meute ? Mais je n'étais pas naïf. Il avait dû remarquer le changement d'odeur dans l'air, et vu les innombrables détails qui montrait bien qu'une meute habitait ici.
Le vent avait subitement tourné, je me stoppa donc net. Un fumet musqué vint me titiller d'un coup les narines, et je compris bien trop tard : une masse me percuta soudainement le flanc gauche, me poussa dans la pente en contrebas. Je dévala en roulant dans la neige froide cette descente, retombant lourdement en bas. Le loup brun bondit, mais j'eu le temps de rouler sur le côté pour l'esquiver avant qu'il ne retombe là où j'étais une fraction de seconde plus tôt. Je me redressa, enfonçant mes pattes profondément dans la neige pour être stable. Le solitaire paraissait furieux, et son regard ambré ne semblait refléter que de la sauvagerie, que de la haine. Il devait bien faire deux têtes de plus que moi, et il était très robuste. J'allais devoir la jouer fine.

En poussant un cri de fureur, il se jeta sur moi. Alors qu'il fonçait sur mon torse, je retourna son élan contre lui en basculant volontairement en arrière, et en le faisait valser par dessus en le propulsant avec mes pattes arrières, le dos courbé. Je me dressa d'un bon sur mes pattes, la fourrures en bataille et les oreilles plaquées en arrières. Je retroussa mes babines, lui dévoilant ma dentition acérée. Il avait beau être grand et fort, ce n'était qu'une brute sans cervelles. Il refit la même action, et je fis la même technique. Je me redressa et lui fit face. A moi d'attaquer.
Je fonce vers lui, et pile au moment où nos corps allaient s'entrechoquer, je dévis ma trajectoire, dérapant sur la neige, et rampe sous son ventre aussi vite que possible, avant de me redresser d'un coup brusque et sec. Grâce à mon dos, le solitaire fut propulsé et chuta au sol. Avant qu'il ne se redresse, je bondis sur lui et le plaqua au sol à l'aide de mes deux pattes avants. J'en profite pour mordre sa fine oreille et tirer, lui offrant une grosse et belle entaille, souvenir de cet affront.


- Ne remet plus jamais une patte sur le territoire Adahy, compris ? je lance d'une voix grondante et sèche, appuyant avec ma patte droite sur le haut de son crâne pour enfoncer son museau dans la neige.


Malheureusement pour moi, je ne vis pas son ami venir à cause du vent qui m'empêchait de capter son fumet. Je fus bousculé et plaqué au sol par deux grosses pattes blanches, et des crocs acérés plongèrent vers mon épaule droite. Ils s'y plantèrent profondément, m'arrachant un grimace et un râle de douleur que je tenta de contenir en moi. Aveuglé par la douleur, je fis claquer mes mâchoires dans le vide, et parvint à choper l'unes de ses pattes avants. Je la serra de toutes mes forces entre mes crocs, et mon adversaire hurla de douleur. Je profita de ce moment où il avait relâché sa prise pour me débattre frénétiquement et me redresser, faisant tituber le loup blanc en arrière. Il posa son regard vert emplie de douleur et de frustration, avant de détaler difficilement avec l'autre solitaire.
Je tenta de faire un pas en avant, mais mon épaule blessée n'avait plus assez de force pour me soutenir, et je m'écroula dans la neige tâchée de sang écarlate, les yeux plissés de douleur et les mâchoire serrées.

Lenno

surnommé Len

Alors que je tentais de me redresser depuis un bout de temps dans la neige, j'avais capté le fumet d'une louve. Mais pas n'importe quelle louve, une Nashoba. Mes griffes ont donc serré la poudreuse blanche, vaine tentative pour rassembler mes forces pour essayer de me lever.

- Essayez d'engourdir votre épaule en la plaçant dans la neige.

J'arrive enfin à me redresser sur mes trois pattes tremblotantes. J'avais perdu beaucoup de sang. Je parvins à faire deux pas avant de m'écrouler une seconde fois dans la neige.

- Ne m'approches pas ! je grogne de ma voix sèche et menaçante, crispée par la douleur, sans toutefois daignais la regarder.

Mes babines se retroussent sous l'effort. C'était une Nashoba, et même si je me foutais s'ils étaient nos ennemis ou non, je ne les connaissais pas et ce qu'on m'avait raconté sur eux ne jouait pas vraiment dans l'estime que j'avais pour eux. En fait, ça m'était égal, tout ce qui contait pour moi était de servir et de défendre ma meute, les autres m'importaient peu. Du moins, c'est ce que j'essayais de me convaincre. Je ne voulais pas de son aide, c'était une inconnue.
Je me traîna dans la neige, pour abandonner quelques mètres plus loin, épuisé, étalé sur mon flanc gauche.

Lenno

surnommé Len

- Alors il est probable que tu ne meurs.


J'entendis ses pas s'enfonçaient dans la neige. Elle semblait se déplacer, en tournant autour de moi, mais à bonne distance. Je ne sais pas si elle avait peur ou si elle était juste méfiante, mais en tout cas elle ne voulait pas prendre de risques.
Malgré moi, je devais reconnaître que pour me soigner, je n'avais aucun don. Et je devais reconnaître aussi que si je voulais survivre, ou du moins rentrer sur mon territoire, je devais l'écouter. Et de toute façon, sois je mourrais ici vidé de mon sang, sois un autre solitaire ou un errant viendrait finir le travail. Au moins, le loup brun et le loup blanc étaient partis, et j'espérais qu'ils eurent retenu la leçon.

Tout en grimaçant, un rictus de douleur déformant mon visage, j'accepta de suivre ce qu'il m'avait dit, c'est-à-dire mettre mon épaule dans la neige pour l'engourdir. Je roula sur le dos pour me tourner, et je me retrouva sur mon autre flanc, l'épaule enfoncée dans l'épaisse neige. Et je du l'admettre, la froideur me soulagea.
Je me décida enfin à regarder la Nashoba. Mon regard perçant se posa sur elle, et je la dévisagea un bref instant. Une silhouette fine, une fourrure crème avec des nuances de blancs et de noirs, et de beaux yeux bleus. Je me surpris à la trouver belle. J'huma son fumet, et une odeur de plantes vint presque m'agresser les narines. Mais son odeur n'était pas désagréable. Mais c'était une Nashoba, et c'était plus fort que moi, j'étais soupçonneux.

Ma respiration se calma, et doucement, mes muscles se décontractèrent, et tout mon corps se détendit, bien que je dû me concentrer à cause de la vive douleur à mon épaule, tout de même réduite par le froid du sol.
Je décide de briser le silence.

- Pourquoi m'aides-tu ? lançais-je de ma voix sèche et méfiante, le regard rivé sur la femelle.

Lenno

surnommé Len

Je devinais sans mal qu'elle appréhendait ma réaction, si elle venait à s'approcher de moi pour tenter de me soigner, ou du moins d'arranger l'état de mon épaule, puisqu'elle était guérisseuse. Mais je ne la connaissais pas, et de plus c'était une Nashoba, c'était plus fort que moi, j'étais méfiant. J'avais repris de mon sérieux, même si la douleur se voyait toujours sur mes traits. Ma douleur s'était légèrement estompée, et c'était déjà beaucoup plus supportable. Je parvins à me redresser, m'aidant de ma patte valide, prenant une position assise, mon membre blessé très légèrement recourbé et levé. Dès que je posais ma patte sur le sol, une vive douleur frappait mon épaule.
Je me souvins que les Adahys et les Nashobas formaient une seule et même meute auparavant. Elle était sûrement l'une des rares personnes à ne pas haïr ses anciens camarades, et c'est pour cela qu'elle m'aidait.. Moi, je n'avais pas vraiment d'avis sur ce sujet. Je ne détestais pas les Nashobas, simplement, j'étais de nature méfiante envers chaque inconnus, et les Nashobas restaient une meute rivale, qui pourrait tôt ou tard nous causer des ennuis.

- Je m'appel Len, je suis bêta guerrier des Adahys.


Je me disais que me présenter pouvait peut être l'inciter à ne plus s'inquiéter sur une éventuelle attaque de ma part. Sauf si elle, elle m'attaquait. Mais je ne pense pas qu'elle le ferait, même si je devais rester sur mes gardes. Au cas où.

Lenno

surnommé Len

Son ton était très professionnel et assez strict, tout comme son expression. Quant à moi, je gardais mon masque sérieux et renfermé, et mon regard observateur dévisageait la louve, comme pour essayer de percer ses pensées, et m'assurer que ses intentions étaient bien bonnes et non hostiles. Mon vécu m'avait appris à quel point certaines personnes peuvent être manipulatrices, fourbes et malsaines. Mais de toute façon, sans elle je ne pourrais pas m'en sortir. Impossible de marcher jusqu'au camp. J'étais peut être impulsif mais je n'étais pas idiot, même s'il m'avait fallu du temps pour accepter son aide. Mes oreilles frémirent, mobiles. J'étais attentif à chaque bruits aux alentours, et aux odeurs variées qui flottaient dans l'air. Je ne sentais que les plantes, l'humidité de la neige et de l'eau non loin, ainsi que bien sûr le fumet Nashoba. Je resta un moment silencieux, voulant m'assurer qu'il n'y avait aucune embuscade, qu'aucun solitaire ou chien n'était dans les parages.

- Je n'ai pas le choix que d'accepter ton aide, finis je enfin par dire en poussant un léger soupir, résigné, mais toujours de ma voix sèche.

Puis, comme pour la rassurer, j'ajoute :


- Tu peux t'approcher, je te donne ma parole que tu ne crains rien.

Lenno

surnommé Len

- Tu comprendras ma méfiance. Je garde les loups en vie ; l'inverse est loin d'être vrai.

Bien sûr que je comprenais sa méfiance, puisque moi même je l'étais. Mais elle verra bien lorsqu'elle sortira indemne de cette '' situation '' que je tiens parole.
J'avais quand même du ma à comprendre son geste. Pourquoi m'aidait-elle ? Bien sûr, son étique de guérisseuse et ses bonnes valeurs morales, qui l'incite à aider quiconque dans le besoin, la poussait à le faire. Mais si son alpha l'apprenait ?
Je m'imagina alors à sa place, tomber sur un loup blessé. Qu'est ce que je ferais ? Tout dépendrait de qui était-ce et du comportement de cette personne. Et sachant que je n'étais pas un guérisseur, et que je ne connaissais rien sur les guérisons, que j'intervienne ou non ne changerait rien. Hormis si c'est un jeune loupiot. Mais un Nashoba ? Je ne ressentais pas forcément de la haine envers eux, mais ils étaient des ennemis de la meute.

Willow s'avança de quelques pas vers moi, et je me força à avoir une allure détendue et coopérative, même si mon esprit m'hurlait de me méfier et de rester sur la défensive.

- Je vais réduire l'écorce en une sorte de cataplasme. Cela permettra de garder la plaie fermée assez longtemps pour que tu puisses retourner auprès des tiens, mais guère plus.


De l'écorce en guise de cataplasme ?
Je ne posa aucune questions, préférant la laissé faire, le visage fermé.

Lenno

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Lorsqu'elle appliqua avec ses pattes le cataplasme, je grimaça, les mâchoires serrées. Je savais me contrôler et endurer la douleur, mais je n'arrivais pas à me concentrer, tous les sens en alertes. Les solitaires pourraient revenir, ou pire, un animal plus dangereux pourrait être attiré par l'odeur du sang, puisque je me trouvais là depuis déjà un bon bout de temps. Je ne laissais rien paraître, mes yeux mobiles observant sans cesse les alentours.


- C'est terminé. Rentre au plus vite chez toi, maintenant.

Je tourna ma tête vers elle, qui se nettoyait les pattes dans la neige, puis jaugea mon épaule. L'étrange texture semblait avoir durcit et me serrait l'épaule, fermant ma blessure et empêchant le sang de couler.
Mon regard vert se reporta sur elle, et je voulu dire le mot merci, mais les mots refusèrent de franchir mes lèvres. Elle semblait étrange. Dans ses pensées, peut être ? Je ne parvenais pas à voir ce qu'elle ressentais, ni à deviner à quoi elle pouvait bien penser. Il fallait avouer qu'elle était plutôt doué pour dissimuler ses émotions. Elle prenait toujours cet air professionnel, peut être pour se cacher d'une certaine façon ?
Après tout, qu'est ce que j'en ai à faire ? C'est un canidé appartenant à une autre meute, et je ne devais me préoccuper que de ma meute. Je me redresse difficilement sur mes pattes.
Je la remercie tout de même d'un hochement de tête, toujours en la fixant de mon regard impassible et sérieux. Bien sûr, j'étais reconnaissant. Sans cette guérisseuse, qui sait si je serais encore là ?
Je pivote doucement sur mes pattes, et sans me retourner, je m'avança en direction de mon camp en boitillant, laissant des traces de pattes marquer le sol enneigé.