Paradise Falls. Cette ville infestée de parasites portait plutôt bien son nom. C'était un lieu réunissant le plus grand nombre de crapule que Kaliska avait vu de sa vie, sûrement le seul, d'ailleurs. Lui qui haïssait les chiens errants était servit, il y en avait partout, dans chaque recoin. De même que ces hommes blanc qui avait contraint ses maîtres et leurs ancêtres à reculer, abandonnant une partie de leurs terres ancestrales. Chaque rue débouchait sur la crasse et la pourriture et Kaliska ne sentait ici que l'odeur du danger.
Pourtant, c'est d'un pas tranquille que le petit chien suivait son maître. Chef de tribu, celui-ci devait aller marchander quelques peaux qu'ils avaient chassé ensemble – bien que le jeune canidé avait surtout passer du temps à l'observer faire, trop petit pour le gros gibier.
Lorsque son maître s'arrêta devant la boutique faîtes de bois, Kaliska l'imita. D'un geste fluide de la main, il lui intima d'attendre dehors et, comme tout bon chien le ferait, le presque Coyote consenti à s'asseoir bien sagement.
Remuant doucement la queue, il fixa la porte en bois sans bouger une seule griffe. Il avait hâte de s'en aller d'ici... C'est alors qu'il entendit un couinement caractéristique. Il leva calmement le museau, observant l'origine du bruit et entraperçu un rat plutôt grassouillet. Il dressa les oreilles, fixant l'animal, immobile. C'est une mauvaise idée... Mon maître m'en voudra... se sermonna-t-il en son for. Mais alors que la raison parlait, une autre voix s'exprima, plus forte. Non, non, si tu te dépêche, ton maître sera content de ce cadeau..
Hésitant, il découvrit ses crocs puis, finalement, céda à son instinct de chasseur. Il se leva avec un dernier regard sur la maisonnette et s'élança dans la neige froide. Il plaqua son ventre au sol, se voulant discret, mais le rongeur ne vit et s'enfuit en courant. Alors Kaliska s'élança à sa poursuite, bondissant dans la poudreuse. Il galopa dans bien des quartiers avant de rattraper l'animal. Alors qu'il ouvrit la gueule, impatient de la refermer sur la bestiole, quelque chose le heurta. Ou plutôt, il heurta quelque chose.
Retombant lamentablement en arrière dans un couinement pathétique, il secoua son museau douloureux, roulant sur le flanc pour ne pas laisser son ventre exposé. Ses yeux dorés se levèrent sur une masse noire et grise alors qu'il découvrit ses crocs.

La bête était noire, même avec la vision de notre cher jeune chien-loup, il pouvait le voir. Se redressant doucement sur ses pattes, prenant soin de ne faire aucun geste brusques, il observa plus en détail le chien devant lui. Rayé gris, bringé, comme certain dirait, il ressemblait a un sorte de canidé. En vu de son odeur, il devait sûrement appartenir à la mine. Il puait le charbon et la sueur, cela fit presque froncé le museau de Kaliska. Du moins, plus qu'il ne l'était déjà.

" C'est quoi ton problème ?! "

Le presque coyote n’appréciât que très peu cette agressivité. Il pouvait la comprendre, évidemment, l'autre avait dû prendre son arrivée pour une agression, mais ce n'était pas non plus une raison pour se laisser marcher sur les pattes. Rabaissant ses grandes oreilles contre son crâne, le chien s'avança un peu, crocs bien en évidences.
Oh, il savait que cela ne ferait pas peur à son vis-à-vis, mais ses canines étaient tranchantes, bien qu'à l'image de son gabarit, plutôt petites.

" Tu étais sur mon chemin. Son ton calme laissait tout de même transparaître une certaine autorité mal placée, je ne t'avais pas vu. " L'explication lui semblait claire. Peut-être qu'avec ça, la brute des mines se montrerait plus conciliante. Il redressa le buste, releva la tête pour paraître plus grand et plus fier et puis, il couvrit ses dents, cessant cette mine agressive pour faire montre d'une plus grande intelligence que ce chien de colon.

" C'est toi, qui devrait me demander pardon. J'ai loupé ma proie par ta faute. "

Le jeune coyote avait beau être rapide, il ne voyait pas l'avenir. Alors qu'il s'attendait à ce que la grande brute noire et grise trouve une répartie cinglante ou passe son chemin, c'est une tout autre réaction à laquelle il eut droit. D'abord, la bête gronda, laissant le jeune Kaliska tout tendu face à un animal aussi agressif et dangereux. Puis, l'avertissement se changea en attaque. Avançant brutalement sur le pauvre petit faux coyote, il le percuta de plein fouet et Kaliska roula dans la neige. Son crâne et son épaule heurtèrent le sol un peu trop vivement et il couina tel un chiot. Il ne fit même pas attention à la mâchoire qui claqua dans le vide.

" Ta proie ? C'toute ton éducation qu'on a raté. "

Relevant le museau, Kaliska senti une colère inouï l'envahir. Comment ce foutu chien osait-il l'insulté et le frapper de la sorte ? Il avait certes un grand sens de l'honneur, mais sa susceptibilité était bien plus présente à ce moment même. C'est pourquoi il s'ébroua pour chasser la neige qui s'était accrochée à son corps et qu'il se mit sur ses pattes. Il fronça le museau, découvrant ses crocs et avança lentement vers la bête grise et noire.

" Je n'ai rien à redire sur mon éducation, le chien. On m'a enseigné l'honneur et le respect des anciens... Mais aussi l'indulgence et la tempérance. Je ne crois pas qu'on puisse en dire autant de toi. " Il aimait réagir à l'offensive par l'offensive, mais il savait bien que contre un titan comme le chien de mine, il valait mieux tenter de régler d'abord les choses par la parole. Aussi, inclinant légèrement l'encolure, il marcha, décrivant de larges cercles autours de lui.

" Présente moi tes excuses et tout sera oublier. "

Kaliska n'eut aucun avertissement, aucun grondement ni froncement de museau pour le prévenir de ce qui allait suivre. Tout ce qu'il vit, ce fut les muscles puissant de la bête des mines s'activer. Il les vit rouler sous sa peau, alors que la mâchoire puissante et sombre du mâle s'abattit sur sa nuque. Il poussa un couinement et tenta de reculer mais ce fut trop tard, bien trop tard.
A la place, les crocs de la bête s'enfoncèrent dans sa peau et dans sa chair. Du sang perla sur sa fourrure grise et sombre alors qu'il fronça le museau de douleur, plissant les yeux en tâchant de rester bien ancré sur ses appuis.
Cela était tout à fait vain car le géant ne cherchait pas à le faire chuter mais bien à le soulever. Kaliska le senti se redresser, lentement. Sa peau se tendit et son corps suivit le mouvement sans qu'il ne puisse rien y faire. Il tenta bien d'enfoncer ses griffes dans la neige, mais ça ne servait à rien. Bientôt, il se retrouva au dessus du sol, les pattes dans le vide, pendu à la gueule de son adversaire.

" ... Lâche moi immédiatement ! " S'écria alors le presque Coyote. Il savait ses supplications veines, aussi, il décida d'agir. Moins par réflexe que par réflexion, il tenta de faire balancier. Ce n'était pas simple, avec les crocs plantés dans la nuque, chaque mouvements lui valait un couinement douloureux.

" Si tu ne me lâche pas... Tu le paieras très cher ! " Et sur ses mots, se balançant, il réussit à poser ses pattes arrières sur les épaules du géant noir, les avant restant en l'air. Ses griffes s’enfoncèrent superficiellement dans la peau alors qu'il tenta de reculer.